La question de l’utilisation des eaux usées retraitées pour l’irrigation, que cette irrigation concerne des sols de loisirs (golfs, jardins publics) ou l’agriculture à des fins alimentaires, questionne fortement à la fois les pratiques de consommation, de production et les politiques publiques. Engageant fortement un rapport intime à un élément vital, l’eau, elle fait en France l’objet d’une controverse qui aujourd’hui ne lui permet pas de figurer parmi les pratiques installées d’une économie plus circulaire.
Quelques chiffres : l’eau douce disponible et accessible à l’humanité, représente 0,001% de la masse d’eau planétaire, soit un volume de 10 000 à 14 000 km3. L’humanité prélève et redistribue 30% de cette eau, soit 4000 km3, sachant que l’agriculture en est la plus grosse consommatrice (70%). L’industrie, elle, en consomme 22% et les municipalités se répartissent les 8 derniers pourcents.
En France, 33 km3 sont prélevés (env. 20% des ressources disponibles et renouvelables). Une grosse moitié est utilisée par les centrales nucléaires, puis viennent les municipalités (19%), l’agriculture (14%) et l’industrie (12%).
Un stress hydrique bien présent et croissant : L’Europe va connaître des difficultés en approvisionnement de son eau douce dans les prochaines décennies : environ un quart de ses territoires est déjà en déficit d’eau pluviale, donc sensible à la moindre évolution démographique ou climatique.
La réutilisation des eaux usées traitées (REUT) peut être une réponse à ce stress hydrique pour certains besoins tels que l’irrigation. Une telle réutilisation est déjà fréquente dans d’autres pays du monde : Californie, Golfe Persique, Israël, Tunisie, Espagne, Italie. La France, quant à elle, rejette à 98% ses eaux usées dans les hydro-systèmes (nappes, rivières, mer…) : elle ne réutilise que 19 000 m3/jour d’eaux usées retraitées dans l’irrigation, quand dans le même temps l’Espagne en utilise près de 1 million par jour.
Pourquoi un tel retard ? Quels sont les obstacles qui limitent la réutilisation des eaux usées retraitées en France à des fins d’irrigation (agriculture liée ou non à l’alimentation, parcs et jardins, golfs) ?
La liste de nos étonnements égraine un certain nombre d’obstacles potentiels à cette démarche. Nous avons choisi de n’en retenir que quelques-uns.